Le Soleil de Villers

Tout le monde sait que le soleil de Villers, magnifique, nous procure chaleur, lumière et bonheur presque 365 jours par an…
Depuis le XVIIème siècle existent aussi, grâce aux moines cisterciens de notre abbaye, un tableau et une gravure appelés « Soleil de Villers » (ci-joint extraits du tableau et de la gravure colorisée par un membre de notre asbl).

Ces deux représentations sont identiques quant à leur signification et leur message : au centre de tous, St Bernard dans son aura, illumine et irradie de sa foi 24 Saints et Bienheureux de Villers, ayant vécus à l’apogée glorieuse (dans toute l’Europe) de l’abbaye au XIIIème siècle.
Autrefois, on y faisait référence en termes de « pépinière de saints » ou encore « Villers La Sainte ».

L’iconographie rappelle à notre mémoire, tous les Bienheureux entourant St Bernard et ce vraisemblablement dans un but de renaissance des convictions spirituelles catholiques, prônée par les Pays-Bas espagnols suite aux troubles religieux protestants du XVIème siècle.
Les novices pouvaient s’inspirer de ce passé glorieux propre à l’abbaye pour confirmer leur foi et leur fidélité.

Que savons-nous du tableau ? (Toile 140cm / 166cm)

La monographie de Henriquez sur les bienheureux de Villers (1622 – Sol cisterciensis in Belgio – ou 1630 – Ménologue) a fort probablement inspiré le peintre (ou le graveur) dans son œuvre.
Selon une expertise réalisée par des moines québécois, il serait daté de 1684 mais pourrait cependant être antérieur à la gravure (datation 1646) ou au contraire postérieur à savoir au XIXème siècle (pour autant que le blason de la famille Goethals (créé en 1830) existant dans le coin du tableau date bien de la peinture et n’ait pas été apposé par après).

Nos recherches et recoupements de sources privilégient une requête émise par l’abbé Van der Heyden (1620-1647) en hommage au travail accompli par l’abbé Henrion (mort en 1620) afin que soit gardé en mémoire les premiers Saints et Bienheureux de Villers.
Une raison confortant une datation du tableau d’avant 1646 étant que le blason ou la devise officielle abbatiale (« Post Tenebras Spero Lucem » apparue en 1643) n’apparaît pas encore sur le tableau.
Nous supposons par déduction une fourchette de datation potentielle du tableau s’étalant de 1623 à 1642.

Le tableau a vraisemblablement été peint par un novice, un moine, un convers ou encore un peintre local ; il comporte de nombreuses erreurs de dessins, de symbolique et de texte mais le message mémoriel glorifiant est quant à lui bien présent.
Le tableau était sans doute exposé dans l’abbaye (maison des novices ?) depuis son origine (abbatiat Van der Heyden), peut-être déplacé ensuite par sécurité dans l’une des maisons refuges à Namur, Bruxelles, Anvers ou Liège.

Pour le sauver des révolutionnaires français (en 1794-1796), la toile a été pliée en 8, cachée et préservée par d’autres moines ou moniales.
Plusieurs pistes très hypothétiques couvrent la période 1796-1830 : passage du tableau par l’abbaye du Mont des Cats, l’abbaye du Mont-d’Or, l’abbaye de Westmalle ?
Comment et pourquoi le tableau arrive-t-il en possession de la famille Goethals qui y appose son blason avant de le céder à l’abbaye de St Sixte après 1831 (date de sa fondation) ?

La toile aurait été apportée au Monastère de Petit-Clairvaux (Canada) par des moines et convers cisterciens belges venant de St Sixte (Westvleteren) vers 1858-1860 et donnée à la fondation du Monastère ND de la Trappe du St Esprit de Ste Justine au Québec en 1862-1863 ; en 1872, le monastère avait déjà été abandonné et la toile remisée dans un grenier du monastère ; retrouvée ensuite en 1878 par Mère St Vincent de Paul (fondatrice du Bon-Pasteur), elle fut transmise à l’Asile des moniales du Bon-Pasteur et enfin offerte sous cadre en mars 1939 au Monastère des Pères cisterciens de ND de Mistassini (fondé en 1893) toujours au Québec.

En août 2024, lors de nos recherches sur ce précieux tableau en vue d’une éventuelle restauration et de le faire rapatrier à Villers, Frère Eddy Augustin, cistercien du Monastère de Mistassini nous apprend avec émotion que la toile a été déchirée par mégarde, puis détruite … en septembre 2023 par des bénévoles lors des déménagements des moines à la vente du monastère.

Que savons-nous de la gravure ? (Impression noir et blanc 39cm / 49cm)

Elle nous est apparue dans un livre de Sanderus, paru en 1659 ; la matrice originale en cuivre buriné, serait antérieure à 1646 ; elle aurait été réalisée par un graveur inconnu pour l’imprimerie du livre de Sanderus, selon le frère Stanislas de l’abbaye de Westmalle qui en possédait une impression unique (actuellement dans un musée en Flandre).

Selon certains historiens, l’auteur de la gravure, bien plus qualitative que le tableau, se serait basé (comme d’usage à l’époque) sur le tableau, l’aurait enrichi, embelli en y corrigeant les multiples erreurs d’écriture, de sens et en y renforçant l’effet irradiant de St Bernard avec les rayons solaires non existants dans la version peinte et en y ajoutant 4 cocardes écrites dans les coins.

A contrario, d’autres historiens seraient d’avis que la gravure pourrait être antérieure au tableau. Le peintre aurait réalisé une copie de la gravure en omettant plusieurs détails sans en maitriser le sens des écritures.
Si tel était le cas, on peut se demander pourquoi le peintre n’a pas reproduit le bandeau de tête, les 4 cocardes et les rayons solaires si puissants dans la gravure … ?

Dans un but mémoriel et afin de faire revivre ces deux soleils, notre asbl a pour projet la réalisation d’une représentation à grande échelle de la gravure et d’une copie de la toile perdue à l’échelle 1/1 qui pourraient être présentées côte à côte dans un espace muséal repensé dans l’abbaye de Villers.

Pour en savoir plus ou nous accompagner dans nos travaux, contactez-nous, devenez membre, c’est gratuit !

Dominique Mommer — asbl « L’Abbaye de Villers en Brabant 2046 » (AVB2046.be)
info@avb2046.be

sources : Coomans – Abbaye de Villers – Erudit – Fr Eddy Augustin – RPM Stanislas – IA – P Simon – Pr Pineault – Lechat – Abbaye de Westmalle